Les surdoués passent le bac ?

Scolarité

Comme chaque année, à l’approche du début des épreuves du bac, les journaux grand public s’en donnent à cœur joie. Ils ont toujours le chic pour dénicher le petit génie qui passe l’examen avec plusieurs années d’avance. Et en tirer des articles ou des reportages qui en font bien souvent une bête de foire. En 2019, ils sont particulièrement gâtés puisque, comme le leur a annoncé le ministère de l’Education nationale, le record du plus jeune candidat au baccalauréat est battu…

Record du plus jeune candidat au baccalauréat battu en 2019
Les épreuves du baccalauréat commencent ce lundi 17 juin 2019. Avec, cette année, un nouveau record de précocité pour l’un des candidats (Photo : Akshay Chauhan on Unsplash)

Ce lundi 17 juin 2019, les épreuves du baccalauréat débutent partout en France. Une période redoutée pour des milliers de lycéens. Mais aussi par de nombreux surdoués qui, comme chaque année, voient fleurir des champs entiers d’article consacrés à des jeunes précoces qui passent l’examen avec plusieurs années d’avance.

Le bac, c’est toujours l’occasion de mettre en avant des « petits génies ». Ces jeunes, intellectuellement précoces, qui ont dû sauter plusieurs classes pour éviter le fatal ennui scolaire. Tous les ans, mi-juin, c’est le marronnier des médias généralistes. Le sujet à sensation qui captive les foules et ravit les annonceurs voraces d’audiences qualifiées.

Record du plus jeune candidat au baccalauréat battu en 2019 !

Et en 2019, nous sommes particulièrement gâtés. Cette année, le record du plus jeune candidat au baccalauréat est battu ! Et oui, tenez-vous bien, il passe les épreuves à 11 ans, sept mois et une vingtaine de jours. Un âge qui lui permet de faire mieux que le record de l’année dernière : 11 ans et dix mois.

Grâce à son exceptionnelle précocité, ce jeune candidat fait la une de nombreux journaux français depuis jeudi 13 juin 2019. Depuis que le ministère de l’Education nationale a, en fait, publié tout un tas de données sur la session 2019 du baccalauréat. Des chiffres repris par l’Agence France Presse (AFP). Et, magie du ruissellement habituel de l’information grand public, par la quasi-totalité des médias « mainstream » de l’Hexagone.

Une simple requête sur un moteur de recherche en ligne permet de le constater. Paris Match, BFMTV, C News, Le Figaro, Huffington Post, Le Parisien, 20 Minutes… Ils ont quasiment tous répondu à l’appel. Le contraire nous aurait évidemment surpris. Voire même peut-être déçu…

L’Education nationale jette un de ses élèves en pâture

Outre l’uniformisation neutralisante de l’information, il y a plusieurs choses qui posent problème. En premier lieu, la communication du ministère de l’Education nationale semble pour le moins maladroite. Jouant le jeu du sensationnalisme, l’institution prend le risque de livrer un élève en pâture à une meute de vautours prêts à tout pour un peu d’information à cracher. Car, évidemment, quand on annonce que le record du plus jeune candidat au baccalauréat est battu, les journaux vont vouloir savoir par qui. Alors, ils lancent leurs fins limiers sur la piste.

Et, à ce jeu, les journalistes de BFMTV sont toujours bien placés. Ils n’ont pas hésité à venir déranger ce jeune recordman avec l’ambition de révéler son identité. Par décence, nous ne relayerons pas leurs « scoops », mais nous saluerons simplement la dignité des parents du jeune homme qui ont tenu à « conserver son anonymat », comme l’indique un article publié sur le site de la chaîne d’info en continu. Ce qui ne l’empêche toutefois pas de préciser dans quelle filière et dans quelle académie est inscrit l’élève. Histoire de ne pas gâcher entièrement tout ce beau boulot d’investigation d’intérêt général.

Ce jeune précoce est-il heureux de l’être ?

Un autre point pose problème à la lecture de tous ces articles. Si le plus jeune candidat au baccalauréat y est inscrit à même pas douze ans, c’est qu’il a forcément sauté des classes. Mais, à aucun moment, dans aucun article, nulle part dans la communication, on explique pourquoi il se trouve si avance dans son cursus scolaire.

Personne ne s’intéresse, non plus, aux conséquences que peut avoir cette avance sur la vie de ce jeune garçon. On le présente comme une bête de foire. Mais, à aucun moment, on se demande si ces plus de 6 années de décalage avec la grande majorité des autres candidats ne le font pas souffrir. S’il ne se sent pas à l’écart, incompris. S’il n’a pas l’impression de ne pas avoir droit à une enfance comme tout le monde…

Et puis, surtout, personne ne s’intéresse à tous les autres élèves précoces, surdoués, HPI, HQI qui, décelés ou non, sont en échec scolaire ou suivent une scolarité « classique » car ils se sur-adaptent. Non, c’est tellement plus simple de mettre l’exception en avant. L’arbre surdoué qui cache la forêt des précoces où la souffrance guette, tapie dans l’ombre et le désintérêt propices à son éclosion.

Retrouvez notre dossier sur la scolarité des élèves surdoués

8 thoughts on “Les surdoués passent le bac ?

  1. Article encore plus affligeant que ceux des médias, « maman de précoces, de dys, de tsa, et de ces fameux enfants très en avance.. . » vous avez un esprit étriqué, mais bon cela fait un nouvel article pour ce » blog » qui critique les médias et en fait autant.

    1. Bonjour,

      Merci de préciser en quoi cet article vous fait dire que l’auteur a l' »esprit étriqué ». Le point de vue est argumenté. Il analyse un traitement médiatique et en tire des conclusions. Que vous ne soyez pas d’accord, nous le comprenons tout à fait mais il serait intéressant d’expliquer pourquoi.

      Bonne journée

      1. Déjà le simple jugement, »petit génie » vous connaissez l’histoire de ce jeune ? Son parcours à été simple ? À t’il des difficultés ? Sous prétexte qu’il y a des enfants qui sautent plusieurs classes on ne devrait pas en parler, pourquoi ?ah oui ! Il saute des classes forcément on a du lui dérouler le tapis rouge et il n’a eut aucune difficultés, aucun mérite !? Pourquoi pas autant de critiques sur le plus âgé ? Vous critiquez les médias mais en faites autant, il y a un article une fois par ans sur le plus jeune, à moins de vivre dans une grotte, il y a des articles toute l’année sur les difficultés des enfants précoces, comme tout records sport ou autres, il est médiatisé et pas à la demande des parents. Je lui souhaite de réussir et de s’épanouir dans le supérieur où il pourra faire ce qu’il aime ! Car il le mérite

        1. L’expression « petit génie » ne juge en rien le jeune garçon qui passe le bac. C’est plutôt un moyen de montrer que les journaux n’ont que cet angle en tête. Celui du surdoué qui a plusieurs années d’avance et passe le bac avec une précocité exceptionnelle. Ce qui occulte les deux autres tiers des HPI qui soit s’adaptent en silence soit sont en échec scolaire. Ce qui est dit dans cet article et qui pose réellement question c’est sur l’intérêt de l’Education nationale de communiquer sur ce jeune garçon de même pas douze ans, sans anticiper que les journalistes vont chercher à savoir qui il est pour le mettre en lumière une journée puis l’oublier ensuite. Avec ce que cela implique en termes de pression notamment. Ensuite, vous dites « il y a des articles toute l’année sur les difficultés des enfants précoces »… Sur ce point, nos avis divergent. Le traitement médiatique de la question de la douance, même s’il tend à se diversifier, reste à mes yeux encore largement sensationnaliste. Et, comme vous, « Je lui souhaite de réussir et de s’épanouir dans le supérieur où il pourra faire ce qu’il aime ». Seulement je regrette qu’on le mette en lumière pour sa précocité et qu’on n’en profite pas pour parler plus sérieusement du sujet.

          1. Si je suis votre raisonnement, il faut une adaptation pour le hp en échec scolaire, si on le compare aux NT, il ne faut pas parler des 2_3 élèves par ans qui sautent des classes sous prétexte qu’ils gênent ceux en échecs scolaire, donc si l on parle des classes ulis segpas etc. Nous ne devons surtout pas parler des neuroathypiques en difficultés ou non cela ne ferait pas progresser les aménagements de ces élèves qui eux sont encore plus en difficultés. Si l’on parle de foot handisport on ne passe plus un match lambda ce ne serait pas équitable etc… Gardez à l’esprit qu’il faut des aménagements, des adaptations pour chaque élève qui en rencontre le besoin qi élevé ou non, et ce sans aucune discrimination. Ceux qui sautent des classes ont eux aussi des difficultés même si ceux là ne vous intéresse pas, quand aux médias en France, même s’ils cherchent l’élève en question cela est interdit et c’est très protégé ! Vous devriez le savoir, seul l’âge est mentionné simplement car les parents n’ont pas donné l’accord pour plus. Lorsqu’il y a des articles complets c’est que les parents l’ont souhaité.

  2. Del, je crois que vous vous méprenez. Je le dis d’ailleurs dans l’article : le problème n’est pas que l’élève ait sauté plusieurs classes. On ne connait pas son parcours. On ne sait pas comment il le vit. Ce que je pointe dans cet article, c’est la course au sensationnalisme dont l’éducation nationale se fait complice. On fait du surdoué une bête de foire qu’on exhibe une fois par an sans se soucier de toute la souffrance scolaire d’autres élèves. Qu’ils soient surdoués ou non. Qu’ils aient sauté des classes ou non. C’est l’exotisation de la précocité. On l’illustration avec le cliché du petit génie. Un cas exceptionnel absolument pas représentatif de quoi que ce soit. Alors qu’il y a tellement de problématiques qui pourraient être soulevées en partant de ce cas de figure

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